Vous êtes ici

La théorie de programme

Le modèle logique de l’IAP illustre les quatre approches conceptuelles à la base du programme, soit : 1) la perspective bioécologique du développement humain; 2) l’approche systémique familiale; 3) l’empowerment; et 4) la pratique réflexive.

La perspective bioécologique du développement humain (Bronfenbrenner & Morris, 1998)

La particularité de la perspective bioécologique du développement humain (Bronfenbrenner & Morris, 1998) est de considérer que les relations tissées par des individus avec des personnes significatives sont les moteurs de leur développement comme être humain. Les hommes développent ainsi leur engagement comme père en étant nourri par des interactions avec leurs proches, par exemple leur conjointe et des membres de leur famille, mais aussi avec les intervenants qu’ils côtoient. Les caractéristiques personnelles du père, soit son âge, son niveau d’éducation ainsi que sa santé mentale et physique, influeront sur son développement. De même, les caractéristiques de son environnement, par exemple son niveau de revenu, son statut d’immigrant, la santé de sa conjointe et le tempérament de l’enfant, auront aussi une influence sur ce développement. 

L’hypothèse d’action sur laquelle repose l’IAP prévoit que le programme contribuera à influencer les processus proximaux de développement dans la vie des pères (expériences d’être soutenus et expériences de disposer de choix et d’information leur permettant d’avoir du contrôle sur leur vie) et, ultimement, des mères (expériences d’être engagées dans une relation de coparentalité) et des enfants (expériences développementales, stimulantes et protectrices fournies par des pères engagés). L’hypothèse conceptuelle de l’IAP anticipe que l’amélioration de ces processus proximaux de développement dans la vie des pères aura des effets ultimes sur la qualité de l’adaptation parentale, de l’exercice des responsabilités parentales et de la relation conjugale, d’où découlera un impact positif sur le développement des enfants (Chamberland & Lacharité, 2007).

L’approche systémique familiale

La perspective systémique familiale invite à considérer le père au sein de la famille. Toute intervention réalisée auprès de l’un des membres aura des effets sur les autres. Les intervenants sont parties prenantes de ces systèmes familiaux, par l’accompagnement qu’ils offrent aux familles au cours de leur vie. Ainsi, plutôt que de proposer un programme ciblé et ponctuel de soutien à l’engagement paternel, l’IAP propose de modifier les croyances et les pratiques des intervenants qui rencontrent les pères et leur famille de sorte à influer sur tous les pères. Des questions systémiques accompagnent la réflexion des gestionnaires et des intervenants à propos de leurs croyances et leurs pratiques, par exemples : Quel est votre rôle auprès des pères? Quelles sont vos croyances à l’égard de la contribution des pères au développement des enfants, de la mère, de la famille? Ou encore, Quelles sont les conditions qui facilitent l’inclusion des pères? Quelles sont celles qui lui font obstacles? En prenant conscience des croyances (majoritairement centrées sur l’importance des mères auprès des enfants) sous-tendant les programmes et les interventions auprès des familles et en les modifiant pour y inclure les pères, les gestionnaires et les intervenants s’engagent dans des changements de pratiques durables.

Le modèle de l’empowerment et l’approche participative

L’IAP veut soutenir les relations tissées par des professionnels de différents horizons disciplinaires, de même que celles développées avec les familles qu’ils côtoient. Le développement du pouvoir d’agir (empowerment) des individus et des collectivités est mis de l’avant (Lebossé & Dufort, 2001). Pour les parents, il s’agit d’être reconnus dans leur expérience, avec leurs capacités et leurs compétences; d’être accompagnés pour utiliser ces compétences et soutenus pour en développer de nouvelles; et, finalement, d’avoir le choix et les informations nécessaires pour prendre des décisions à propos de leur vie et de celle de leurs enfants. Pour les intervenants, il s’agit d’être engagé dans des activités participatives qui facilitent les collaborations avec leurs collègues, leurs gestionnaires et les milieux de vie des pères (Dunst, Trivette & Deal, 1994). Ils sont alors invités à décrire les expériences particulières qu’ils vivent; à déterminer les conséquences ou les effets qu’une situation peut avoir sur eux-mêmes (émotions, pensées, espoirs, actions, etc.) et sur les autres (relation, perceptions, etc.); à évaluer la nature de ces effets; et, enfin, à justifier ces évaluations sur la base des valeurs qui y sont associées (ce à quoi ils accordent de l’importance dans leur vie, pour eux-mêmes ou pour les autres) (Lacharité & Gagnier, 2009).

Telle que préconisée par l'IAP, une approche fondée sur des ateliers réflexifs, alliant des discussions réflexives à des échanges plus théoriques, permet à la fois de conscientiser les intervenants aux besoins des pères, de susciter le désir de développer ses habiletés, d’adapter sa démarche au contexte réel de travail, de modifier ses croyances et de s’influencer réciproquement (Goudreau & Duhamel, 2003; Granlund & Bjorck-Akesson, 2000; Karlsson, Björk-Akesson & Granlund, 2008; Kelly & Newstead, 2004; Peden-McAlpine, Tomlinson, Forneris, Genck & Meiers, 2005; Tomlinson, Thomlinson, Peden-McAlpine & Kirschbaum, 2002; Lerouche, 2005; Suzie, 1999). L’approche réflexive permet aux intervenants de faire des allers-retours sur leur propre pratique, de confronter, de valider et d’enrichir leur expérience en relation avec les familles qu’ils côtoient (voir Figure 2).


Figure 2 :  L’approche réflexive telle que présentée dans les ateliers réflexifs